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bloc-notes d’Axel Gryspeerdt
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Bo Juyi (Chine, dynastie des Tang, 772-846) et Mi Fu (Chine, dynastie des Song, 1051-1107), esthètes, poètes et amateurs de jardins et de paysages

Bo Juyi

Les pierres qui permettent d’atteindre la quintessence du ciel et de la terre
Voilà qui nous en dit long sur les critères esthétiques de la pétrophilie à la chinoise. Vivant sous la dynastie des Tang, le poète et grand collectionneur de pierres Bo Juyi (772-846) était convaincu que « leur esthétique (...) élève l'amour des pierres et des rochers au même rang que celui des livres, de la cithare ou du vin » (Che Bing Chiu, Jardins de Chine ou la quête du Paradis, Ed. de la Martinière, Paris, 2010, p. 115).

Le lecteur de Che Bing Chiu apprend que « les lettrés vouaient une vénération à ces symboles de la puissance tellurique et de la force créatrice de la Nature, et les collectionnaient à l'égale d'œuvres d'art » (p.114).

À cet égard, l'auteur contemporain, passionné par les jardins chinois, ajoute deux commentaires illustrant le rôle simultanément spirituel et matériel joué par les collections de pierres : « La pierre, que le lettré percevait comme une montagne tout entière, écrit-il, constitue un monde à part, un monde en soi. Des qualités et des critères furent établis pour juger et apprécier une pierre » (p.115). « Un aspect insolite, une forme exceptionnelle, une texture spécifique, des couleurs extraordinaires suffisaient à évoquer un paysage, des événements, une ambiance, des personnages...» (p. 114).


Mi FuEn outre, Che Bing Chiu relève l'existence de filiations de collectionneurs de pierres. Il présente ainsi Mi Fu, ayant vécu près de trois siècles après Bo Juyi, comme un disciple de ce dernier, admirateur des poèmes et des éloges aux pierres que son aîné rédigea.

En insistant longuement sur le fait que les deux sages sont l'un et l'autre des collectionneurs avisés et des amateurs éclairés de pierres, Che Bing Chiu, spécialiste de l'âme des jardins chinois, témoigne de la signification profonde que représentait à leurs yeux l'amour des pierres. Certes, pour les lettrés chinois, ce dernier est lié à la connaissance du monde, mais il l'est aussi à « l'énergie vitale et au souffle de l'Univers ». Les pierres ne seraient-elles pas, ainsi qu'ils le percevaient, le signe de «la quintessence du Ciel et de la Terre, qui les ont façonnées tels des êtres vivants » ?

Quelques siècles plus tard en Occident, les objets de toute collection n'apparaissent-ils pas parfois, aux yeux de ceux qui les ont constituées, comme le signe de « la quintessence du Ciel et de la Terre, qui les ont façonné(e)s tels des êtres vivants » ?




Che Bing Chiu, Jardins de Chine
Che Bing Chiu, Jardins de Chine

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