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Pierre Bergé, le retour!


Le Soir.be
Mis en ligne le 19/09/2018
Par Jean Vouet

Du 29 au 31 octobre, Sotheby's dispersera à Paris des œuvres et objets d'art ayant appartenu au compagnon d'Yves Saint Laurent.

Lecomte du Noüy, La porte du sérail, souvenir du Caire, 1876 (huile sur toile, 75 × 130,5 cm). Est. 500.000 - 700.000 €, Sotheby's Art Digital Studio
Lecomte du Noüy, « La porte du sérail, souvenir du Caire, 1876 »
(huile sur toile, 75 × 130,5 cm). Est. 500.000 - 700.000 €, Sotheby's Art Digital Studio


Il ne se passe plus une année sans qu'une vente consacrée à l'homme d'affaires Pierre Bergé ne soit mise sur pied. Le patrimoine important de cet esthète s'y prête bien entendu, tout comme la dispersion de son immense bibliothèque qui a déjà requis quelques sessions les années précédentes. Celle-ci fut d'ailleurs lancée du vivant du bibliophile disparu il y a un an, le 8 septembre 2017.
Cette fois, Sotheby's a été chargé par Madison Cox, le paysagiste américain que Bergé avait épousé six mois avant sa disparition, et ce en association avec la maison de ventes qui porte son nom, de disperser un millier de lots ayant appartenu à l'ancien compagnon d'Yves Saint Laurent. Le produit ira d'ailleurs à la Fondation Pierre Bergé - Yves Saint Laurent.

« Transformer des objets en projets »

C'est ainsi que Madison Cox résume la raison de cette vente, stipulée dans le testament de Bergé qui n'a rien laissé au hasard.
La Fondation Pierre Bergé - Yves Saint Laurent fut créée en 2002. À l'époque, détail piquant qui en dit long sur l'ego de Bergé, le nom du couturier venait en premier… La Fondation a notamment pour mission de conserver 5.000 vêtements de haute couture, 15.000 accessoires et 50.000 dessins, ainsi que des objets divers qui témoignent des quarante années de création d'Yves Saint Laurent.
Elle est symbolisée par deux lieux prestigieux, le premier à Marrakech et le second avenue Marceau à Paris, au siège historique de la maison de couture. Madison Cox qui préside la Fondation a pour ambition d'y créer « un lieu où nous pourrons vraiment recevoir étudiants et chercheurs, et rendre tout cela beaucoup plus accessible au public. Il s'agit d'un projet ambitieux, mais qui a du sens. » Or, tout cela coûte beaucoup d'argent, non seulement maintenant, mais également pour assurer la pérennité de l'institution. Lucide, Madison Cox ajoute « je ne suis pas inquiet du lendemain mais de l'avenir, dans vingt-cinq ou cinquante ans. Cette fondation ne va pas continuer à recevoir de l'argent à flots. Son compte bancaire va diminuer petit à petit. »

Accents personnels

Madison Cox décrit les biens proposés à la vente comme « des pièces qu'il se réservait » et qui garnissaient ses différentes résidences. Parmi celles-ci l'on retrouve des toiles de Bernard Buffet, le premier amour connu de Bergé. Un sujet sensible entre lui et le couturier, si bien que ces tableaux n'étaient pas accrochés dans les pièces de vie du couple, mais dans les quartiers des domestiques ! Ce n'est qu'après la vente des pièces phares de la collection commune au Grand Palais, que ces œuvres ont fait leur apparition aux cimaises des salons de Pierre Bergé.

Bernard Buffet, L'atelier, 1956, dédicace A Pierre Bergé, le 18 août 1956 (huile sur toile, 116,9 cm x 89,2 cm). Est. 80.000 -120,000 €, Sotheby’s Art Digital Studio
Bernard Buffet, « L'atelier », 1956,
dédicace « A Pierre Bergé, le 18 août 1956 »
(huile sur toile, 116,9 cm x 89,2 cm).
Est. 80.000 -120,000 €, Sotheby's Art Digital Studio


Parmi les pièces importantes de la vente de la fin du mois prochain, citons un paravent de Jean-Michel Frank, déniché par Cox lui-même. En effet, bien que le mariage avec Bergé ne date que de mars 2017, les deux hommes se connaissaient depuis près de quarante ans et Cox a donc bien connu Yves Saint Laurent, ce qui explique sans doute également sa désignation à la tête de la Fondation.

Les goûts de Pierre Bergé étaient éclectiques et l'on retrouvera dans la vente deux œuvres monumentales : La porte du Sérail par Lecomte de Nouÿ et Le garde du Palais par Ludwig Deutsch. Toutes les deux pendaient dans la chambre de Bergé dans l'appartement de la rue Bonaparte. Autre morceau de peinture XIXe, Les quatre saisons par Jean-Baptiste Debret. Des œuvres de grande décoration qui seront certainement moins au goût du jour qu'un masque réalisé par Picasso ou encore un surtout de table des Lalanne.

Pablo Picasso, Masque, 1961 (tôle découpée, pliée et peinte, h. 17,7 cm). Est. 60.000 - 80.000 €, Sotheby’s Art Digital Studio
Pablo Picasso, « Masque », 1961 (tôle découpée, pliée et peinte, h. 17,7 cm).
Est. 60.000 - 80.000 €, Sotheby's Art Digital Studio


Il y a également une quarantaine de masques, principalement africains, une collection commencée par Bergé après la mort de Saint Laurent. Et puis, Sotheby's dispersera les douze œuvres de Bernard Buffet que possédait l'homme d'affaires. Sans doute l'occasion d'un nouveau record en vente publique pour cet artiste au statut particulier.

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