Collectiana a visité, à Leuven, en avril 2021, une double collection très originale, dont un foisonnement d'aspects est révélé via une exposition réalisée et présentée par un passionné de romans-photos.

Il s'agit d'une sélection de dizaines, voire de centaines de romans-photos de tous genres : car si le roman-photo est un genre, celui-ci se décline de multiples façons. Une large diversité de sous-genres s'y retrouve, tout comme aussi dans les ciné-romans-photos, qui constituent le point fort de la collection de Jan Baetens. Certes, tous sont plus ou moins sentimentaux, mais certains se piquent d'être policiers, érotiques, intellectualisés, artistiques, documentaires ou ... combinés.

Comme pour tous les genres, le roman-photo connaît ses séquences-clefs, sans lesquelles il aurait peine à exister : amour recherché, amour déclaré, amour tourmenté, attentes comblées… Ainsi, quand elle arrive, la scène du premier baiser figure toujours dans la dernière image.


Vu la pandémie , les changements de programme de certains et l'hésitation d'autres personnes à fréquenter les lieux culturels pendant cette période, la visite s'est déroulée en deux moments et en tout petits groupes que Jan Baetens a reçus et pilotés dans l'univers de la « photonovel » en nous en montrant l'histoire, les modalités de confection, de diffusion et de réception, les « grandes figures » et, dans leur ensemble, les divers ressorts.

Il nous apprend notamment que si la première « photonovel» naît en Italie en 1947, le genre s'européanise très vite, et d'abord sous forme de feuilletons, dans les magazines, en langue française, néerlandaise, allemande, anglaise... Les Belges y sont particulièrement bien représentés, en versions française et flamande ; les scénaristes-réalisateurs provenant parfois de la BD ou du cinéma. Surprise ainsi d'y (re)trouver Jacques van Melkebeke, ainsi que Michel Charlier ou encore Richard Olivier. Autre révélation : l'imposant photoreportage réalisé par Jean-Marc Bodson lors du tournage à Bruges des Eaux Maléfiques du majestueux auteur de romans-photos français Hubert Serra, publié en Belgique.

L'ensemble est excellemment présenté dans trois salles spacieuses bien aérées. Présentoirs, armoires vitrées, grands panneaux colorés, cartels clairs en trois langues, films vidéos, photos-contacts, matériels préparatoires, scripts et, bien entendus magazines de diverses origines, langues et années.


La grande bibliothèque de Leuven n'en est pas à son premier coup. Avant Photo-Lit, elle a déjà consacré une exposition au même thème en 2014 ; cette fois, c'est un double fond qu'elle met à l'honneur. Celui de la KBR et celui de Jan Baetens. Et ceci grâce au talent muséologique et scénographique d'une dizaine d'étudiants du master en études culturelles de la KU Leuven. Non satisfaits de se lancer dans une expérience muséale, ces étudiants de diverses nationalités ont en outre réalisé eux-mêmes un roman-photo, inspiré par une réalisation de Hubert Serra.


Si vous avez raté la visite et la documentation disponible sur place, dont le roman-photo réalisé par les étudiants, vous serez consolés par la lecture, ici hautement conseillée, des ouvrages de Jan Baetens : Pour le roman-photo (2010) ; Le roman photo, un genre entre hier et demain (2018) ; The Film Photonovel : a cultural history of forgotten adaptations (2019).
À noter aussi la numérisation des romans-photos de la KBR.

Axel Gryspeerdt

Site de l'exposition