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bloc-notes d’Axel Gryspeerdt
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Jean Bessarion (Trébizone, 1403 – Ravenne, 1472),
peint par Carpaccio...
Vittore Carpaccio
Le saint protecteur des collectionneurs ?
Situé dans la chapelle des Esclavons à Venise, le tableau peint au tout début du XVIe siècle par Vittore Carpaccio, né Scarpazza, représente-t-il saint Jérôme ou saint Augustin écrivant dans sa cellule ? Assez curieusement, les critiques et historiens d’art ne tranchent pas sur le sujet. Pour les uns, tel Terisio Pignatti, (Carpaccio, Editions Skira, Genève, 1958), il s’agit à coup sûr de Jérôme attelé au travail d’écriture de la vulgate, alors que selon Krzystof Pomian, le personnage représenté est Augustin, grand théologien et Père de l’Eglise.

Le saint, représenté assis devant sa table de travail, est pénétré d’une étrange lumière qui semble provenir d’on ne sait quelle source. Il a levé sa plume – la main qui la tient figure là même où le peintre a voulu que convergent nos regards – et s’est arrêté d’écrire pour regarder par la fenêtre comme s’il cherchait son inspiration ou comme s’il était figé par une apparition. Sur la table sont posés plusieurs livres et manuscrits, ainsi que des objets très divers : encrier, ciseaux, clochette, coquillage, sphère armillaire… A ses pieds, sont déposés d’autres manuscrits, ouverts ou fermés. Un peu plus loin, un petit chien blanc frisé, de race maltaise, semble subjugué par la même lumière qui traverse le tableau. Fixée au mur gauche, une étagère remplie de livres, recouverts de maroquin coloré – Pignatti a compté 40 ouvrages – est superposée à un pan de mur sur lequel sont alignés diverses statuettes et encriers. Dans le fond du studio un petit oratoire laisse voir d’autres livres, ainsi que des objets divers.

Jean BessarionMalgré leurs divergences sur le sujet représenté dans le tableau, tous les analystes de celui-ci s’accordent cependant pour prétendre que le peintre vénitien a trouvé l’origine de son inspiration dans un cabinet de collectionneur de son époque et identifient le modèle en la personne de Jean Bessarion, premier protecteur de l’Ecole des Esclavons, traducteur en langue latine d’œuvres de Xénophon et d’Aristote, et très important possesseur de livres du XVe siècle.

Totalisant quelques 800 volumes rares, glanés à travers l’empire ottoman et l’Italie du sud, la bibliothèque de Bessarion est considérée comme une des plus fournies de l’époque.

On raconte que le prêtre, qui termina sa vie cardinal, aurait voulu léguer ses précieux documents à la République de Venise, qui fit longtemps la fine bouche avant d’accepter de les déposer à la bibliothèque Marciana. On considère aujourd’hui que ce legs en constitua un des premiers importants fonds.

Par l’accumulation des manuscrits et d’objets de toute sorte, par la volonté d’exposer ses livres aux regards des visiteurs et d’en faire don à la fin de sa vie, Jean Bessarion, né sous le nom de Basile Bessarion, devenu patriarche latin de Constantinople et cardinal Bessarion, figure ainsi sans conteste parmi les plus prestigieux ancêtres des collectionneurs.
Ne mériterait-il dès lors pas d’être nommé saint patron et protecteur de ceux-ci ?
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