Un chasseur de courriers postaux, Patrick Maselis (né en 1961, vit à Roulers en Belgique),

« Collectionner, c’est retrouver », telle pourrait être la devise de Patrick Maselis, mais ce dernier préfère mettre davantage en évidence les éléments cognitifs. Dès lors, son propos pourrait être énoncé plus précisément de la manière suivante : « Collectionner, c’est ressusciter le passé, le recomposer, en trouver suffisamment de traces pour faire renaître des histoires et surtout des pages d’Histoire ».

Au départ d’une accumulation de timbres – Patrick Maselis est avant tout un philatéliste et un fils, petit-fils et arrière-petit-fils de philatélistes – il a collecté un ensemble impressionnant de correspondances relatives aux implantations flamandes dans le monde entier, c’est à dire les lettres, les cartes postales, les enveloppes et bien entendu les timbres qui font état d’échanges entretenus entre la Flandre et les régions du monde, manifestant une trace flamande sur les terres reculées : "Des Açores à la Nouvelle Zélande", ainsi qu’il dénomma un ouvrage résultant de sa passion (Roularta Books, Roulers, 2005).

Sa profession elle-même, qui l’amenait déjà à se déplacer, s’est vue rehaussée par ses activités de collectionneur; ses relations professionnelles ont commencé à le percevoir différemment et à lui parler de plus en plus souvent, à côté des affaires traitées, de ses recherches et de ses travaux d’investigation.
Serait-ce à l’aide de ces connaissances professionnelles qu’il a pu valider les cachets postaux, en expliquant les systèmes d’oblitération et en décrivant de temps en temps les bureaux de postes fixes ou maritimes ?

Bref, petit à petit, et hérédité y contribuant, Patrick Maselis est devenu un chasseur de courriers postaux, ne se contentant pas de rechercher les documents du passé, mais aussi de collecter les objets contemporains en relation avec celui-ci : fêtes commémoratives, rappels d’événements, évocations du passé. Au point qu’il ne rougit pas en se présentant aujourd’hui comme un expert « en histoire postale ». Ainsi sa marotte lui a permis de découvrir qu’entre 1451 et 1916, la Belgique aurait compté « 14 colonies sur les six continents ». En feuilletant son livre, il est particulièrement amusant de constater que finalement son art l’a amené à combiner étroitement la cartophilie avec la cartographie et de voir que chaque objet récolté, très visuel, est considéré par lui comme le signe, la trace, la mémoire du passage de Flamands sur les terres étrangères. Flamands nomades, racontant leur vie dans les régions de leur installation, Flamands sédentaires écrivant aux membres éloignés de leur famille. Quant à lui, il est parvenu à articuler le versant nomade et le versant sédentaire du collectionneur. Se déplaçant tantôt dans le monde entier pour « faire » les bouquinistes, les antiquaires, les salles de vente et les marchands de manuscrits; restant chez lui le reste de son temps libre pour ranger, pour écrire et aussi de plus en plus souvent pour réaliser des recherches et des achats sur internet.

Nouveau paradoxe : est-il cohérent de poursuivre cette nouvelle voie ? L’extension considérable des moyens électroniques et le développement du tourisme culturel ne marqueront-t-ils pas en quelque sorte le tarissement des traces naguères laissées par le courrier postal ? Ou bien vont-ils relancer la nécessité impérieuse de retrouver, coûte que coûte, les anciennes traces du passé en développant la traque, la fouille et la recherche de vieux manuscrits et d’anciens timbres ? Le Web s’avèrera-t-il un concurrent, signalant la fin de la partie, ou sera-t-il au contraire un ami du philatéliste et du cartophiliste, en l’aidant à satisfaire mieux et au mieux sa passion ?

NOTE : Un blog (Belgian Power: history: our 25 colonies) reprend des extraits et des illustrations du livre de Patrick Maselis, intitulé en langue néerlandaise, « Van de Azoren tot de Zuidpool » [Des Açores au Pôle Sud], Roularta Books, Roeselare, 2005. Adresse de ce blog.